TEMOIGNAGES ORAUX REALISES PAR LES ARCHIVES DEPARTEMENTALES DE L'ESSONNE - LE CRESSON EN ESSONNE.

Déplier tous les niveaux

Cote/Cotes extrêmes

13AV/1-42

Date

2004

Organisme responsable de l'accès intellectuel

Archives départementales de l'Essonne

Description physique

42 articles

Origine

DIRECTION DES ARCHIVES DEPARTEMENTALES (service producteur)

DIRECTION DES ARCHIVES DEPARTEMENTALES (service versant)

Modalités d'entrées

versement

Présentation du contenu

Cette collecte de témoignages oraux constitue une collection sur le thème du cresson et de la cressiculture. Elle faisait suite à une demande du PNR (Parc Naturel Régional du Gâtinais Français) qui souhaitait conserver et valoriser la mémoire des cressiculteurs de l'Essonne. 17 personnes ont été interviewées du 16 juin au 15 décembre 2004 par Christine Mathieu, archiviste oral aux Archives départementales de l'Essonne et par Yannick Le Chaudelec, chargé de mission au Parc Naturel Régional du Gâtinais Français (PNR). Elle représente 17 cassettes DAT et un témoignage uniquement sous forme écrite.

Les témoignages suivent un questionnaire pré-établi :

A) Présentation du témoin 1 - Nom, prénom et âge du témoin 2 - Etes-vous originaire de la région ? 3 - Quel métier exerçait vos parents ? 4 - Quels métiers avez-vous exercés autre que celui de cressonnier ? 5 - Avez-vous vécu ailleurs que dans la région?

B) Devenir cressonnier 1 - Quels sont vos premiers souvenirs liés au cresson ? Avez-vous grandi dans une cressonnière ? 2 - A quel âge avez-vous commencé à exercer votre profession ? 3 - Avez-vous eu le choix ? (si non, quelle autre activité auriez-vous voulu faire ?) 4 - Avez-vous été révolté de ne pas avoir eu le choix ?/ Etiez-vous heureux de pouvoir exercer cette activité ? 5 - Quelle scolarité avez-vous suivi ? (certificat d'étude, lycée, autres ?) 6 - Auriez-vous aimé faire des études ? 7 - Quelles sont les premières tâches que l'on vous a confiées dans la cressonnière ? 8 - Y-avait-il d'autres enfants/apprentis avec vous ? Quel âge ? 9 - Quelles étaient les conditions de travail lorsque l'on débute dans ce métier ?

C) Etre cressonnier 1 - Pouvez-vous nous raconter comment se déroulait une journée ordinaire sur une cressonnière ? 2 - Combien d'heures passiez-vous par jour au travail ? Temps de pause ? 3 - En quoi consistait le métier de cressonnier ? Y a-t-il de grandes différences avec aujourd'hui ? (gestes, outillages, langage..). Parlez-nous des paniers d'osiers, des genouillères, des planches à couper, des rouleaux à cresson, des cabanes et des abris (des rails Decauville). 4 - Combien étiez-vous à travailler sur la cressonnière ? 5 - Pouvez-vous nous expliquer quel type d'ambiance régnait sur les lieux (convivialité, animosité, rivalité, vie de groupe ou individualisme, ambiance familiale ?) 6 - Avez-vous en mémoire des journées qui vous ont marqués particulièrement (événement exceptionnel, hiver glacial, été caniculaire, autres) 7 - Avez-vous souffert de ce métier et comment faisait-on face à la pénibilité de la tâche ? 8 - Est-ce qu'il existe un parler spécifique aux cressonniers ? (patois, chansons) 9 - Quelles sont les images fortes qui vous restent de ce métier ?

D) Autour du cresson 1 - Quel place tenait la culture du cresson dans le village / canton ? 2 - Le métier de cressonnier était-il reconnu ? 3 - Avez-vous eu un rôle important au sein de la commune (maire, conseiller municipal, autres). Racontez-nous l'ambiance dans les conseils municipaux ? 4 - Vivait-on bien de la culture du cresson ? 5 - Pouviez-vous vous accorder des loisirs et si oui quels étaient-ils (bal, cinéma, congés payés, voyages). Est-ce que la Saint-Fiacre vous dit quelque chose ? 6 - Parlez-nous des fêtes du cresson (reine du cresson, chansons, rallye, stands commerciaux, produits vendus.) 7 - Restait-on exclusivement entre cressonnier également en dehors du travail ? 8 - Quelles relations entreteniez-vous avec le reste de la population du village ? Avec les agriculteurs ? 9 - Quelle image pensez-vous que les habitants se faisaient de vous ? 10 - Aviez-vous des relations avec les autres cressonniers de la région ? (rivalité, entraide, syndicalisme, mariage entre familles de cressonniers ?) Pouvez-vous nous raconter comment se déroulaient les réunions syndicales à Paris, en Essonne, dans le village ? 11 - Votre famille s'est-elle entièrement consacrée au cresson ? Recettes avec le cresson ? (origine, fréquence des repas au cresson) 12 - Comment s'organisaient la vente et la commercialisation du cresson, selon les époques ? Utilisation de moyens de transport (chevaux, chemin de fer, camions, vélos, motos). Changements apportés par le transfert des Halles de Paris à Rungis ? 13- Evolution de la demande et des consommateurs.

E) Conclusion 1 - Etes vous fier d'avoir exercé ce métier ? 2 - Quel regard portez-vous sur cette activité aujourd'hui ? 3 - Quels sont les grands changements que vous avez remarqués sur cette activité ? Les témoignages oraux originaux ont été enregistrés sur cassettes DAT et ont été transférés sur CD Audio qui sont les supports de communication et de conservation (13AV19-42).

Langue des unités documentaires

Français

LE CRESSON EN ESSONNE. SOUVENIRS DE DOLLY GREFFIN (Boutigny-sur-Essonne).

Cote/Cotes extrêmes

13AV/6

Date

2004

Importance matérielle

01/30/00

Caractéristiques physiques

produit fini, DAT, Interview

Origine

DIRECTION DES ARCHIVES DEPARTEMENTALES (service producteur)

DIRECTION DES ARCHIVES DEPARTEMENTALES (service versant)

Présentation du contenu

SOUVENIRS DE DOLLY GREFFIN Le cresson à Boutigny-sur-Essonne. Réalisé par Christine Mathieu, archives départementales de l'Essonne et Yannick Le Chaudelec, Parc Naturel Régional du Gâtinais Français. Date : 5 août 2004

5/8/04

Dolly GREFFIN, née DEUDON le 24 janvier 1934 à Corbeil, cressicultrice à la retraite.

Dolly Greffin, cressicultrice à la retraite, nous raconte ses souvenirs sur sa carrière et sur l'histoire de la cressiculture à Boutigny-sur-Essonne.

Etes-vous originaire de la région ? Son père est né à Vayres mais sa famille est originaire du nord. Quel métier exerçait vos parents ? Son père était cressiculteur. Il s'appelait DEUDON Roger. II] Devenir cressonnier Quels sont vos premiers souvenirs liés au cresson ? /Avez-vous grandi dans une cressonnière ? On allait aider dans la cressonnière le jeudi. Elle peignait le nom de son père sur les paniers, elle ramassait les bottes sur le chemin et faisait plusieurs tours de brouette pour les ramener à la cabane. Elle fendait l'osier le soir à la veillée de 18h à 20h, pendant l'hiver. A quel âge avez-vous commencé à exercer votre profession ? Elle a commencé le métier à 16 ans. Elle a d'abord travaillé chez ses parents jusqu'à son mariage à 21 ans. Ensuite, elle s'est mariée avec un cressiculteur et a travaillé avec son mari. Son père, qui habitait Vayres, avait commencé à travailler à 13 ans. On l'avait mis chez un patron à D'Huison (la famille Lionnet) et s'est établi ensuite quand il s'est marié. Il n'avait pas eu le choix de travailler dans les cressonnières. Sa mère avait 8 enfants et elle était veuve. Il fallait que les enfants aillent travailler. Les jeunes étaient logés et nourris chez les patrons qui les employaient. Deux oncles, une tante et des cousins sont devenus cressiculteurs également. Avez-vous eu le choix ? (si non, quelle autre activité auriez-vous voulu faire ?) Avez-vous été révolté de ne pas avoir eu le choix ?/ Etiez-vous heureux de pouvoir exercer cette activité ? Etant jeune, ce travail dans les cressonnières ne lui plaisait pas beaucoup. Elle aurait aimé être coiffeuse. On ne pouvait pas dire à ses parents que le travail ne nous plaisait pas. Il fallait aider dans les différentes tâches des cressonnières. Elle s'est mariée avec un cressiculteur alors elle est restée dans ce métier. Son mari Roger Greffin était ouvrier dans la cressonnière de son père. Il était fils de cressiculteur : Louis Greffin à Vayres-sur-Essonne. Beaucoup de femmes de cressiculteurs ont travaillé avec leurs maris mais peu faisait les bottes de cresson. Elles participaient au travail : emballage, rouler le cresson après avoir semer l'engrais pour enfoncer le cresson afin qu'il ne soit pas brûlé par l'engrais. Elles ramassaient l'herbe dans les fosses. Les tâches des hommes : l'entretien des chemins, le nettoyage des fosses, éberger les fosses [enlever l'herbe]. C'était des tâches trop difficiles pour les femmes. Quelles sont les premières tâches que l'on vous a confiées dans la cressonnière ? Avec son père, elle ne bottelait jamais. Elle aidait pour le ramassage des bottes posées sur le chemin. Son père ne voulait pas qu'elle fasse des bottes. Ce n'était pas un métier de femme. Sa mère n'avait jamais bottelé. Sa mère et elle mettaient les bottes dans les paniers d'osier. On mettait 216 bottes par panier et on " paillait " autour pour que le cresson tienne bien. Y avait il d'autres enfants/apprentis avec vous ? Quel âge ? Elle était fille unique. Ses cousins sont cressiculteurs à Maisse : la famille Leclerc. Ils ont démarré le métier très jeunes. Son mari, Roger Greffin était fils de cressiculteur mais son père n'avait pas assez de terre pour employer son fils dans sa cressonnière. Il est venu travailler dans les cressonnières de Monsieur Deudon. Monsieur Greffin (père) a ensuite racheté les cressonnières où il travaillait pour lui et son fils. Cette cressonnière appartenait au château [Vayres-sur-Essonne]. III] Etre cressonnier Elle exploitait avec son mari une cressonnière à Vayres-sur-Essonne et une autre aux Audigers (commune de Boutigny-sur-Essonne). Elle possédait le double de matériel pour chaque exploitation. Elle a travaillé jusqu'à 67 ans. Pouvez-vous nous raconter comment se déroulait une journée ordinaire sur une cressonnière ? Combien d'heures passiez-vous par jour au travail ? Temps de pause ? Avant les Halles de Rungis (avant 1969) : elle travaillait du lundi au samedi. Le camion de ramassage ne passait pas le dimanche. Elle commençait à couper le cresson à 7h30-8h jusqu'à 12h. Au printemps, elle aimait travailler quand il faisait frais. C'était la grosse saison, le moment où il y a plus de travail. On faisait des bottes toute la journée. L'après-midi, elle travaillait de 13 heures 30 à 19 heures. En hiver, ils commençaient avec le jour. Ils devaient attendre que le cresson dégèle. Parfois, ils ne pouvaient pas couper avant 10 heures, alors ils mangeaient plus tôt pour pouvoir couper le cresson à l'heure du déjeuner, aux heures les plus chaudes. Ils travaillaient jusqu'à ce qu'il gèle le soir, jusqu'à environ 17 heures. C'est l'hiver le plus difficile. On avait les mains gelées, on attrapait des onglées. En hiver, on sélectionne le cresson le plus beau pour laisser pousser le cresson plus jeune. La coupe du cresson : elle n'a jamais coupé sur la planche, contrairement à son père. Elle descendait directement les pieds dans la fosse. Elle rembourrait ses bottes avec des chaussettes ou des chaussons pour ne pas avoir trop froid aux pieds. Son père et son mari ont changé de technique de coupe parce qu'ils avaient trop mal aux genoux sur la planche. Ce n'était pas facile de travailler avec la planche. Une fois, Madame Greffin est tombée dans la fosse parce qu'elle a glissé de la planche. Elle n'a jamais recommencé. Les bottes étaient attachées autrefois avec des brins d'osier. Au temps de son père, chaque cressonnier avait un champ d'osier qu'il cultivait. Il fendait l'osier avec un rasoir à la veillée. Ensuite, ils en ont acheté. Les genouillères : elles étaient en cuir avec une doublure. On mettait un rembourrage à l'intérieur. On les attachait aux jambes avec des courroies. Cela faisait mal aux genoux. Les cressonniers avaient souvent les genoux enflammés au bout d'une journée de coupe. Les vêtements de travail : un pantalon, un tablier en plastique. En cas de pluie, on avait des capes de pluie. Ils avaient des vêtements de rechange dans les cabanes, en cas de besoin. La météo : on est tributaire du temps pour cultiver le cresson. On avait des petits trucs pour reconnaître quand il allait faire froid. On se fiait à la lune. On devait renfoncer le cresson dans l'eau sinon il était coupé au ras de l'eau. Le cresson a besoin de beaucoup d'eau de source pour qu'il puisse supporter les grands froids d'hiver. Il y avait des puits artésiens sur ces cressonnières. Le débit de l'eau protège le cresson parce que l'eau se refroidit moins vite. Les bottes de cresson : Elle a commencé à botteler quand elle a travaillé avec son mari. Cela permettait d'aider son mari et d'aller plus vite. Ils pouvaient se remplacer quand l'un des deux était malade. Son mari a été malade pendant 20 ans, elle a gardé l'exploitation. Elle se faisait aider par son père et son beau-père qui étaient retraités, pendant qu'elle vendait son cresson à Rungis. Ils ont commencé à lier les bottes avec des liens en plastiques où il y avait leur nom à partir des cas de la douve du foie. Ces liens permettaient de connaître la provenance du cresson (traçabilité). Les paniers d'osier : on bottelait dans les fosses. On jetait les bottes de cresson sur les chemins. On les ramassait pour les laver. On les jetait dans un grand trou dans les cabanes. Ils les mettaient dans des paniers d'osier qu'ils achetaient. Il fallait avoir un bon roulement de panier (entre 40 et 50) parce que parfois, ils pouvaient perdre des paniers. Ils ne revenaient pas des Halles. Chaque panier avait une étiquette avec les initiales du cressiculteur et un numéro. C'était la corvée de peindre tout ça. Quand elle était jeune, son père lui demandait de peindre en blanc son nom. Les cabanes : on y entreposait tous les outils et les engrais. Elles ont beaucoup servi avant qu'ils aient des chambres froides (avec Rungis). Dans la cabane de la cressonnière des Audigers, il y avait une petite cabane aménagée avec une cheminée et une cuisinière. Parfois, ils y mangeaient. Elle apportait le repas qui était réchauffé sur place. La maison était loin de la cressonnière. Quand il y avait beaucoup de travail, cela leur permettait de gagner du temps. Avec les Halles de Rungis (après 1969) : les horaires de travail variaient selon les commandes prévues pour le lendemain. Elle commençait à trois heures du matin pour transporter le cresson à Rungis et pour le vendre. Elle ne coupait plus le cresson. Elle travaillait 6 jours sur 7, du lundi au samedi. A Rungis, le samedi a été ensuite supprimé. Il fallait être à Rungis à 4 heures du matin jusqu'à midi. En revenant, elle allait travailler sur les cressonnières. Le soir, elle mettait le cresson en caisses dans les chambres froides et ils mettaient les voiles quand il faisait nuit. Le matin à 3 heures, il fallait charger le camion. En hiver, il y a moins de marchandises. Elle allait seulement trois jours par semaine aux Halles (mardi, jeudi, vendredi). En quoi consistait le métier de cressonnier ? Y a-t-il de grandes différences avec aujourd'hui ? (gestes, outillages, langage..). Parlez-nous des paniers d'osiers…, des genouillères…, des planches à couper, des rouleaux à cresson, des cabanes et des abris. Comment s'organisaient la vente et la commercialisation du cresson, selon les époques ? Utilisation de moyens de transport (chevaux, chemin de fer, camions, vélos, motos…). Changements apportés par le transfert des Halles de Paris à Rungis ?Evolution de la demande et des consommateurs. Le nettoyage des fosses : on roulait le cresson, puis on ébergeait le tour des fosses. On enlevait ensuite les ébergures à la faux. Ce travail provoquait un bon mal de reins. Actuellement, on a des faucheuses. Avant, on coupait tout à la faux. C'était plus long et plus difficile à faire. Les Halles de Paris : elle a débuté avec les mandataires des Halles Centrales de Paris. Les mandataires des Halles de Paris : ils s'appelait Minard, Thévenin, Klein, Barberot. Ils se servaient, et nous, il ne nous restait pas grand chose. Les cressonniers leur donnait la production du jour. Mais s'ils en donnaient trop, les mandataires pouvaient baisser les prix pour pouvoir tout vendre. Les cressonniers ne contrôlaient pas du tout leur vente. Elle rencontrait les mandataires tous les mois aux Halles de Paris. Les rapports avec les mandataires étaient parfois conflictuels quand les cressonniers trouvaient que les mandataires n'avaient pas bien vendu leur cresson. Les cressonniers trouvaient que les mandataires étaient un peu arnaqueurs. Parfois, les mandataires venaient voir les cressiculteurs dans la région. Le transport du cresson : il existait un ramassage par camion tous les soirs. Le soir, on mettait les paniers sur un quai pour les mettre dans. les camions. Tous les cressonniers avaient un quai et le camion passait chez chacun pour le ramassage. Les Halles de Rungis : Dès que les Halles de Rungis se sont installées, Madame Greffin a pris une place au pavillon producteur pour vendre elle-même son cresson. Elle avait une bonne clientèle et tenait le stand avec une autre femme (une cressicultrice de Moigny-sur-Ecole). Au début, elle a été la seule cressicultrice de l'Essonne à avoir une place au stand producteur des Halles de Rungis. Ensuite, Madame Barberot de Méréville est venue s'installer. Ses cousins Leclerc ont pris également une place. Ils trouvaient que c'était plus avantageux de vendre son cresson soi-même que de passer par des mandataires. Elle vendait son cresson directement aux commerçants, aux restaurateurs. Grâce aux commandes, elle pouvait prévoir un peu plus la production pour les jours suivants. Ils étaient plus libres pour vendre le cresson. Ils ne dépendaient plus des mandataires. Les voiles plastiques : les voiles P17 ont permis de garder le cresson plus au chaud. Ils les ont utilisés à partir des années 1980. Les semis d'été : le cresson fleurit naturellement au mois de mai. On garde des fossés pour récolter la graine. Tout le cresson est arraché. On vide et on nettoie les fosses, on enlève la boue. On les lave et on les passe au formol. On doit avoir fini de semer pour le 14 juillet. La meilleure époque pour semer, c'est du 25 juin au 14 juillet. On sème à sec, on arrête l'eau dans les cressonnières. Au fur et à mesure de la pousse du cresson, on remet petit à petit l'eau. On met de l'engrais (super phosphate) quand le cresson mesure à peu près dix centimètres. Avant, on mettait de l'engrais en poudre. Il fallait rouler au moins trois fois le cresson avec le rouleau pour ne pas qu'il brûle. Après, ils ont acheté de l'engrais en granulé. Il tombait bien au fond, cela nécessitait plus qu'un seul passage de rouleau. On mettait également du sulfate de fer pour reverdir le cresson. La camionnette : elle a passé son permis à 20 ans pour pouvoir travailler. Ils ont eu une camionnette relativement tôt par rapport au reste de la population du village. La société Darbonne : ils fauchaient le cresson en vrac pour le vendre à Darbonne. Ils ont arrêté de travailler avec Darbonne à l'arrivée des Halles de Rungis. Le marché de Boulogne-Billancourt : elle a commencé à vendre son cresson le samedi quand ce jour a été supprimé à Rungis. Elle vendait bien son cresson. Il fallait être deux au stand. La consommation du cresson : Elle pense qu'il se vend de moins en moins. Les gens sont de plus en plus exigeants, ils ne veulent plus éplucher leur botte de cresson. Elle n'a jamais vendu de cresson en sachets plastiques. Combien étiez-vous à travailler sur la cressonnière ? Il y avait trois botteleurs (père, beau-père, un ouvrier) et elle allait vendre le cresson à Rungis. Puis son gendre a repris l'exploitation avec un ouvrier. Elle a appris le métier à son gendre qui était photographe de formation. Elle a continué à vendre le cresson à Rungis quand son gendre était patron. Ils étaient quatre à travailler sur les cressonnières. Son père et son beau-père venaient toujours l'aider. Ils ne pouvaient pas s'en passer, même après la retraite. Pouvez-vous nous expliquer quel type d'ambiance régnait sur les lieux (convivialité, animosité, rivalité, vie de groupe ou individualisme, ambiance familiale… ?) Il y avait une bonne ambiance sur le chantier. C'était sympa. Si un de nous tombait dans les cressonnières, tout le monde riait bien. Cela arrivait de tomber dans les fosses, surtout quand il faisait froid. Quand il faisait beau, ils mangeaient dehors sous les arbres. Il y avait une bonne ambiance familiale, ils écoutaient la radio. Le transistor était sous la brouette et ils coupaient avec la musique. Il fallait bien avoir un petit peu de gaieté. Il fallait bien s'entendre pour bien travailler sur la cressonnière. Elle aimait travailler avec son beau-père. Cette ambiance faisait un peu oublier la dureté du travail. Avez-vous en mémoire des journées qui vous ont marqués particulièrement (événement exceptionnel, hiver glacial, été caniculaire, autre…) Certains hivers étaient très froids. On devait rouler pour enfoncer le cresson. Les cultures étaient très abîmées par le gel. Toute la récolte était gelée, le cresson devenait rouge. On devait arrêter le travail. Après, ils ont utilisé des voiles P17 qui permettaient de gagner 5 degrés. Les cressiculteurs n'ont jamais utilisés les serres. Il n'existait aucune indemnité lorsque le cresson est complètement gelé. En 1956, toutes les cressonnières ont gelé. Il a fallu tout arracher et tout ressemer. Quand c'était comme ça, c'était la catastrophe. Avez-vous souffert de ce métier et comment faisait-on face à la pénibilité de la tâche ? Le plus dur, selon elle, c'était de faire les bottes. Cela donnait mal aux reins. Elle ne coupait pas sur la planche. Elle était debout dans les fosses. Le mal d'estomac : c'était difficile de digérer avec le corps plié en deux. Beaucoup de cressonniers ont eu des ulcères à l'estomac. Il ne fallait pas trop manger le midi pour être plus à l'aise pour digérer. C'était dur de nettoyer les chemins, arracher le chaume, vider la boue. Tout le travail était manuel. Quelles sont les images fortes qui vous restent de ce métier ? Les bons souvenirs quand il faisait beau. Le mieux, c'est qu'on n'avait pas de patron et on pouvait choisir nos horaires de travail. IV] Autour du cresson Quelle place tenait la culture du cresson dans le village / canton ? Il existait beaucoup de cressonnières à Boutigny-sur-Essonnes (4 chantiers) et à Vayres-sur-Essonnes. Le métier de cressonnier était-il reconnu ? Quelles relations entreteniez-vous avec le reste de la population du village ? Avec les agriculteurs ? Le métier était bien perçu par les gens du village. Certains habitants venaient directement sur les chantiers pour acheter des bottes de cresson. Ils étaient considérés comme des maraîchers. A Rungis, elle était mise aux pavillons des maraîchers. Il existait une bonne entente parmi les vendeurs de Rungis. Vivait-on bien de la culture du cresson ? Si on travaillait bien, on pouvait vivre bien du cresson. On payait un ouvrier. Elle a eu des difficultés parce que son mari est tombé malade. Pouviez-vous vous accorder des loisirs et si oui quels étaient-ils (bal, cinéma, congés payés, voyages…). Est-ce que la Saint-Fiacre vous dit quelque chose ? On pouvait prendre des vacances au mois d'août au moment des semis d'été. Son père restait pour surveiller le cresson. On avait quelques loisirs (théâtre, bals, fêtes de village). Elle n'a pas connu la Saint-Fiacre. Parlez-nous des fêtes du cresson (reine du cresson, chansons, rallye, stands commerciaux, produits vendus….) La fête du cresson à D'Huison n'a pas duré longtemps. Elle ne faisait pas de stands. Une fête du cresson est remise au goût du jour actuellement à Méréville. Aviez-vous des relations avec les autres cressonniers de la région ? (rivalité, entraide, syndicalisme, mariage entre familles de cressonniers… ?) Pouvez-vous nous raconter comment se déroulaient les réunions syndicales à Paris, en Essonne, dans le village … Les différents cressonniers se fréquentaient peu. Il n'existait pas d'entraide entre eux. Il existait une certaine concurrence, il y avait des réputations qui se faisaient. Les mandataires connaissaient bien la qualité du travail de chaque cressonnier. Peu d'enfants de cressonniers se sont mariés entre eux. Le syndicat des cressiculteurs : le nombre de réunions syndicales s'est réduit. Les cressiculteurs se réunissaient au café du Peu à Vayres-sur-Essonne. Ces réunions servaient surtout à s'entendre sur le prix du transport. Alors quand le transport individuel s'est développé, il y en a eu de moins en moins. Dans ces réunions, ça s'enguelait. Il existait des clans. Méréville a toujours été mis à part. Les exploitations étaient plus grandes à Méréville. Les autres cressonnières étaient plus modestes, plus des entreprises familiales. Il y avait des hiérarchies et des rivalités. Les cressiculteurs de Méréville avait plus d'argent. Recettes avec le cresson ? (origine, fréquence des repas au cresson) Elle mange du cresson. Elle décore son plat de viande avec du cresson. On le mange cru avec le jus de viande. Elle le mange également en soupe (cresson, pomme de terre ou riz, crème fraîche). Elle le mange également en salade, il faut l'assaisonner au dernier moment. Son père en mangeait également régulièrement. Le cresson est très bon pour la santé. Une fois, elle est allée chez un médecin de la Ferté-Alais. Il lui a dit de lui ramener une botte de cresson quand elle venait le voir. Elle lui a répondu : Vous n'en mangerez pas souvent, parce que je ne suis pas souvent malade. V] Conclusion Etes vous fière d'avoir exercé ce métier ? Pas de fierté particulière. Elle ne regrette pas d'avoir exercé ce métier. Mais si c'était à refaire, elle ne le referait pas. Il faut avoir une bonne santé. Quel regard portez-vous sur cette activité aujourd'hui ? Quels sont les grands changements que vous avez remarqués sur cette activité ? Il y a de moins en moins de cressonnières. On est tout le temps dehors. Les jeunes ne sont pas attirés par ce métier, on est tributaire du temps. Il y a de moins en moins de cressiculteurs en France. Elle aurait eu un garçon, elle n'aurait pas conseillé à son fils de reprendre ce métier. Elle est inquiète pour l'avenir du métier. Elle pense que les cressonnières vont disparaître. Le cresson se vend peu dans les supermarchés. Il y des normes sanitaires pour l'eau beaucoup plus stricte qu'avant. On peut polluer l'eau de source avec les produits chimiques. La DDASS vient faire des analyses de la qualité d'eau. Ils surveillent également les cas de douve. Actuellement, ses cressonnières ont été vendues et elles n'ont pas été reprises.

Conditions d'accès

NC Numérisé [substitution:13AV/26;13AV/27/]

sans délais

Langue des unités documentaires

Français

Informations sur le traitement

Notice établie conformément à la norme ISAD(G), norme générale et internationale de description archivistique (2000), et à la DTD-EAD (Encoded Archival Description), informatisation de la description.

Mots clés lieux

Mots clés matières

Mots clés auteurs

Mots clés typologiques